Brève histoire de l’émail.

Les prémisses de l’émaillage remontent sans doute à l’ère babylonienne, ou au célèbre bleu des scarabées égyptiens, ou encore à un type de rouge très particulier qui ornait bijoux et armures celtes ; quoiqu’il en soit, elles se confondent cependant à l’époque avec l’ensemble des techniques du verre et du feu.

Le vocable latin Electrum, du grec Elektron (qu’Homère emploie pour qualifier les décorations présentes sur le bouclier d’Achille, dans l’Iliade), qui subsista dans l’Antiquité tardive, est petit à petit abandonné au profit de Smaltum et Emallum (du Haut allem. & gotique. smelzan, smaltjan, fondreou du latin maltha, sorte de mortier). En Europe, ce sont les diverses invasions barbares qui remettent la technique de l’orfèvrerie émaillée à l’honneur, enrichie des influences byzantines et vénitiennes. Puis, à l’époque carolingienne, en concomitance de l’invention du verre cathédrale, l’émail cloisonné est mis au point et son essor se déploie entre les royaumes wisigoths, puis l’Espagne arabo-andalouse, les écoles médiévales de Conques, de Limoges et de la Meuse. Au XIVe siècle, une nouvelle technique est inventée à Sienne, celle du champlevé basse-taille, où l’on applique des émaux translucides sur un bas-relief au ciseau. L’Italie redevient alors un important laboratoire d’excellence de cet artisanat. Plus généralement, l’engouement pour l’émaillage fut tel qu’il supplanta régulièrement le recours aux pierres précieuses, même pour les couronnes et les sceptres les plus précieux, et qu’il perdura pendant le Moyen-Âge. À la Renaissance, l’apparition de l’émail peint se développe au coude à coude avec la miniature à l’huile et opère dans cette discipline un renouvellement quasiment contemporain en Italie et en France. La miniature à l’émail, qui en découle, sera au XVIIIe la base de nombreux bijoux figuratifs, en particulier des médaillons, des pendants d’oreilles et des broches.

En somme, pendant près de 35 siècles, de nombreuses techniques d’émaillage ont été développées grâce à l’apport des diverses populations qui les ont raffinées. Successivement absorbé et théorisé par de nombreuses écoles et mouvements artistiques, cet art appliqué a traversé les temps pour atteindre le nôtre de façon presque intacte.

bague email grand feu nour mira 104

À propos du procédé en lui-même.

Cela reste un art du feu difficile, exigeant une grande maîtrise, car l’artisan doit avoir la dextérité, la patience et la passion de travailler en partie à l’aveugle : le résultat final, souvent étonnant, ne devient visible qu’après plusieurs cuissons. Mais au fait, d’où proviennent-ils, ces magnifiques chatoiements des émaux, ces bleus, ces verts et ces rouges si sublimes que certains monarques et certaines princesses les préféraient au scintillement des pierres précieuses ? Eh bien c’est à la fois magique et chimique (on vous avait dit que Nour Mira est un laboratoire alchimique contemporain).

L’émail est un mélange vitreux issu d’un fondant (composé de minéraux tels que la silice, le feldspath, le quartz) que l’on broie et auquel on ajoute des oxydes métalliques en poudre destinés, lors la fusion produite par le feu (800/900°), à colorer le fondant, tout en lui laissant sa translucidité. Les couleurs de l’émail sont inaltérables. À titre d’exemple :

  • Pour des tons verts : oxyde de cuivre,
  • Pour des tons bleus : oxyde de cobalt,
  • Pour des tons violets : oxyde de manganèse,
  • Les tons rouges sont obtenus en saupoudrant de l’oxydule d’or ou de l’oxyde de cuivre,
  • Pour les tons gris clair : oxyde de Platine,
  • Pour les tons jaunes : sulfure de cadmium,
  • Pour les tons noirs : oxyde d’iridium,
  • Pour les tons bruns : oxyde de fer.

Mais, si elle est secrètement gardée depuis des siècles, la composition de tout émail est aussi propre à chaque artisan. Quant à la teinte et à la transparence finales, elles dépendent autant de la quantité d’oxydes ajoutée que des composants initiaux des frittes de verre apposées sur le métal, de la température et du type de four, du refroidissement imposé au matériau en sortie de cuisson… donc du savoir-faire et de la fantaisie de l’artiste, et du hasard. D’un point de vue chimique, l’émail est un produit minéral, ce qui lui confère sa résistance à la chaleur, aux agressions chimiques, aux intempéries, aux chocs thermiques, des propriétés exceptionnelles qui assurent son intégrité et la pérennité tout à fait remarquable de ses couleurs.

La présence de l’émail à l’atelier Nour Mira.

Relativement délaissé dans la création de bijoux contemporains en dépit de sa longévité et de sa versatilité, il tenait à cœur à l’atelier Nour Mira de perpétuer ce procédé millénaire, avec son aspect aléatoire lui conférant toute sa singularité, et d’entretenir et de transmettre ce savoir-faire dans les collections de bijoux de la marque. Ainsi, vous trouverez des pièces présentant des techniques différentes de l’émaillage :

  • L’émail transparent, qui s’utilise en fine couche et dont la transparence laisse voir la couleur du fond métallique, dans notre atelier de l’argent ou de l’or. En superposant les couches d’émaux transparents à travers plusieurs cuissons, on obtient des nuances dont la moire et les irisations sont sans pareille.
  • L’émail cloisonné : fabriqué à l’aide d’une plaque de fond sur laquelle sont soudées de petites lames de manière à former les figures que l’on veut obtenir. La réunion de ces lames produit des cases dans chacune desquelles on dépose l’émail en poudre (chaque couleur dans sa case). À la cuisson, l’émail fond et les lames ou cloisons le retiennent dans ces contours, et empêchent le mélange des couleurs. Lorsque les cases sont formées, non par des lames soudées de champ sur le fond, mais par des cavités creusées au ciseau dans l’épaisseur de cette plaque même, on dit que l’émail est champlevé.
  • L’émail peint : pas de cloison, les différentes teintes sont appliquées les unes à côté des autres, et on parvient ainsi à un effet fondu.

L’émail est notamment présent dans la collection sur la Chevalière Mirage et la bague Soul Love.